Un modèle de diversification
Transformation du bois, récolte, transport, travaux non-commerciaux, acériculture, le Groupement forestier Métis-Neigette se signale par son excellence dans une vaste gamme de domaines. Au fil de son histoire maintenant riche de 50 années, ce n’est donc pas un hasard si le groupement s’est imposé comme l’un des plus importants au Québec.
Alexandre D’Astous
Tel qu’on le connaît aujourd’hui, le groupement est issu de la fusion réussie survenue en 2018 entre les sociétés d’exploitation des ressources de la Mitis et de la Neigette. Auparavant, à l’instar plusieurs autres groupements forestiers de l’Est-du-Québec, ceux de Métis et de Neigette sont nés en réaction aux conclusions du Bureau d’aménagement de l’Est-du-Québec qui recommandait la fermeture de nombreuses municipalités rurales. La lutte s’est cristallisée autour des Opérations Dignité quoi ont mené à la création en parallèle des deux sociétés en février 1974.
Parmi les événements importants dans l’histoire de celles-ci, le directeur général du groupement, JOËL GUIMOND, parle de l’implication dans la transformation du bois qui a propulsé les deux entités avec des usines de transformation de feuillus mous à Saint-Fabien et à La Rédemption (scierie Serdam).
La fusion, le 2 février 2018, a notamment permis au groupement de se lancer dans l’acériculture. « C’était dans l’air du côté de la Neigette et cela a pris de l’expansion au moment de la fusion. Nous avons acquis l’Érablière Robin Malenfant à Saint-Narcisse-de-Rimouski, une entreprise de 92 000 entailles. C’est la fusion qui nous a permis d’acquérir cette grosse érablière en terre publique », racontent M. Guimond et le président du groupement, PIERRE SIROIS.
Le groupement opère un autre site acéricole à Saint-Marcellin sur un bloc de lots privés que la SER de la Neigette avait acquis pour développer une érablière.
Transport du bois
La fusion a aussi permis l’acquisition de deux entreprises de transport de bois, Transport J.M. Thibault et Transport C. Bélanger, de Saint-Narcisse-de-Rimouski. Il y a quelques années, le groupement un garage dans le parc industriel de Saint-Narcisse pour effectuer l’entretien mécanique des camions.
« En 2019, l’objectif était d’être un peu plus autonome pour le camionnage de notre bois, mais ça ne répond qu’à 50% de nos besoins. Nous utilisons également des sous-traitants », indique M. Sirois.
Ce dernier est président du conseil d’administration depuis pas moins de 24 ans, d’abord à la Société de la Mitis, puis au Groupement depuis sa création. Joël Guimond était directeur de la SER de la Mitis au moment de la fusion. Il a par la suite été directeur adjoint du groupement avant de devenir directeur général en 2021.
Récolte record
L’une des principales activités du groupement demeure la récolte de bois. Une année record a été enregistrée en 2023 avec un impressionnant volume de près de 230 000 mètres cubes de bois solides récoltés en forêt privée, publique et lots intramunicipaux. « Cela représente 6 000 camions chargés de bois, soit 1 000 de plus que l’année précédente. Le groupement est parmi les meneurs dans ce domaine au Québec », souligne fièrement M. Guimond.
En forêt privée, le groupement compte 1 800 propriétaires membres. Les propriétaires peuvent faire leurs travaux eux-mêmes ou les confier au groupement, option qui est de plus en plus fréquente depuis quelques années. « Il y a de moins en moins de propriétaires qui sont équipés pour faire leurs travaux. Nos propriétaires sont vieillissants et on offre un bon service. Il y a une vingtaine d’années, on faisait 60 à 65% des travaux. Aujourd’hui, on réalise environ 80% des travaux », mentionne M. Sirois.
Les travaux de coupe sont presque exclusivement confiés au groupement. « Les propriétaires font surtout des travaux de débroussaillage. La nouvelle génération de propriétaires a un lot pour les loisirs. Ils nous demandent de leur faire un plan d’aménagement et de faire les travaux requis », ajoute M. Guimond.
200 employés
Avec toutes ses filiales, le Groupement forestier Métis-Neigette emploie 200 personnes, à part des sous-traitants. « Nous n’avons pas de multifonctionnelles. Les travaux de coupe sont faits par des entrepreneurs. Depuis trois ans, nous n’avons plus de bûcherons », mentionne M. Sirois.
Le groupement effectue tous les types de travaux en forêt, du reboisement à la récolte, en passant par les éclaircies commerciales ou précommerciales. « Ça commence avec la confection du plan d’aménagement », signale M. Guimond.
Le groupement effectue également des travaux en forêt publique pour des industriels. « Nous avons de l’ouvrage en masse. Avec le chablis de décembre 2022, nous avons beaucoup de bois à ramasser et le délai tire à sa fin. Il y a aussi du bois de tordeuse à ramasser. Présentement, on priorise les chablis. Le bois de tordeuse, lorsqu’il n’est pas renversé, va vivre plus longtemps que celui des chablis où l’on parle de deux ans. Nous sommes dans la dernière phase de récolte pour ce bois », affirme M. Guimond.
Les résultats records de la dernière année sont d’autant plus impressionnants qu’ils surviennent dans un contexte où le marché du bois s’avère peu favorable en raison des faibles prix qui ont cours actuellement. La fermeture de l’usine de Lulumco à Luceville a des impacts importants puisque c’était le seul acheteur de bois résineux de huit pieds et quatre pouces dans la région. Présentement, ça prend du neuf pieds pour Cedrico et le Lebel. « On coupe selon les besoins de nos acheteurs », indique M. Guimond
Propriétés forestières
Le Groupement forestier Métis-Neigette possède plusieurs lots boisés. « Nous avons 4 500 hectares environ en propriété. On se sert de ces propriétés souvent lorsque le marché est difficile. Nous avons des entrepreneurs qui ont investi beaucoup d’argent. On veut les faire travailler. Même chose pour nos débroussailleurs. Lorsque nos propriétaires font faire moins de travaux, on compense sur nos propriétés. On veut faire travailler notre monde pour ne pas les perdre », explique le directeur général qui ajoute que le rôle de son organisation est de créer de l’emploi et de générer de la richesse dans la région. Guimond.
Transformation du bois
C’est bien connu, le secteur de la transformation du bois vit présentement des moments difficiles avec des prix qui se maintiennent à des prix planchers. Malgré les annonces de fermetures qui se succèdent un peu partout au Québec, les deux usines du groupement poursuivent leurs activités. « Je ne dirais pas que c’est facile, mais on survit. On réussit à opérer à pleine capacité et à écouler nos produits, même si le prix de vente n’est pas là. On veut garder notre main-d’œuvre, déjà qu’elle est difficile à recruter », souligne M. Guimond.
« En 2018 et 2019, nous avons connu des années assez fastes dans nos deux usines. Le marché de la composante de palette était excellent. De 2018 à 2023, nous avons retourné des ristournes à nos propriétaires qui nous livraient du bois. Nous avons aussi réinvesti nos profits pour moderniser nos usines et améliorer les conditions de travail de nos employés. Nous avons investi pour le bien-être de nos employés », mentionne M. Sirois.
122 000 entailles
Le groupement opère 122 000 entailles sur deux sites, soit 92 000 en forêt publique et 30 000 en forêt privée. « Nous avons un potentiel de 50 000 à 70 000 entailles supplémentaires en forêt privée. Dans les érablières aussi, nous avons investi pour le bien-être de nos employés », souligne M. Sirois.
« La diversification de nos activités a des effets positifs. Pendant que le marché du bois est difficile, nous venons de connaître une année record en acériculture avec une production de 700 000 livres de sirop d’érable », souligne M. Guimond.
Main-d’œuvre étrangère
Le Groupement forestier Métis-Neigette a recours à la main-d’œuvre étrangère et a développé une solide expertise à cet égard. « Nous avons commencé à y penser avant la pandémie parce que nous manquions de monde. On se moment, nous avions entamé des démarches en Inde, mais la pandémie a tout arrêté. Après la pandémie, nous avons participé à une mission au Maroc. Le fait que les Marocains parlent français est facilitant. En février 2022, nous avons deux ingénieurs qui sont allés recruter là-bas. C’est un long processus. Les premiers sont arrivés en mai 2023. Ce sont des mécaniciens pour nos usines », raconte M. Guimond.
Dans un contexte de pénurie de logements, le groupement n’a pas eu peur d’innover en convertissant une bâtisse commerciale qui était inoccupée en logements pour accueillir ses travailleurs venus d’ailleurs. « Nous avons une vingtaine de travailleurs étrangers. Ce sont des gens qui viennent ici dans l’intention de s’établir. Jusqu’ici le résultat est très intéressant. Ça nous permet d’offrir un service à nos propriétaires. On regarde pour en avoir d’autres. C’est quand même assez coûteux et ça demande beaucoup de temps. Quand on fait venir des gens, il faut être capable de les faire travailler à l’année. Avec les érablières, ils peuvent faire le tour. À l’origine, c’était pour nos propres employés », explique M. Guimond.
Les employés des érablières du Groupement sont aussi prêtés à des membres propriétaires, notamment pour l’entaillage. « C’est un service qu’on essaie de développer ».Parmi les bons coups des dernières années, le directeur général note la création d’un fonds forestier pour les propriétaires de 150 000$ par année et la participation dans un projet domiciliaire à Saint-Narcisse-de-Rimouski.
Projet de regroupement avec le Témiscouata
Et le projet de fusion avec le Groupement du Témiscouata? « On y tient parce que nous savons les bienfaits que le regroupement de 2018 nous a apportés. Il faut être attractifs pour nos employés. Les jeunes cherchent des entreprises en croissance. Nous allons revenir à la charge au printemps prochain. Nous allons voir à mieux informer nos gens », répondent Guimond et Sirois.
Pour célébrer son 50e anniversaire, des activités sont prévues à l’automne, notamment des visites des sites de travaux en forêt, ainsi que des installations acéricoles et de l’usine Serdam.
Signé Dany Rousseau, directeur général du journal Le Monde forestier